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Research

Prévalence de la cysticercose porcine dans trois abattoirs d´Antananarivo, Madagascar: comparaison inspection des carcasses versus tests sérologiques

Prévalence de la cysticercose porcine dans trois abattoirs d´Antananarivo, Madagascar: comparaison inspection des carcasses versus tests sérologiques

Prevalence of porcine cysticercosis in three slaughterhouses in Antananarivo, Madagascar: comparison of carcass inspection versus serological tests

Kouadio Thierry-Borel N’dri1,2, Zara Nomentsoa Razafiarimanga3, Tantely Randriamparany4, Mireille Nowakowsky5, Joseph Allico Djaman1,6, Ronan Jambou2,7,&

 

1UFR Biosciences, Département de Biologie et Santé, Université Felix Houphouët-Boigny Cocody, Abidjan, Côte d´Ivoire, 2CERMES, Niamey, Niger, 3Faculté des Sciences, Mention Biochimie Fondamentale et Appliquée, Université d´Antananarivo, Antananarivo, Madagascar, 4Laboratoire National de Diagnostic Vétérinaire (LNDV), Antananarivo, Madagascar, 5Plateforme des Protéines Recombinantes, Institut Pasteur de Paris, Paris, France, 6Département de Biochimie Médicale, Institut Pasteur, Abidjan, Côte d´Ivoire, 7Global Health Department, Institut Pasteur, Paris, France

 

 

&Auteur correspondant
Ronan Jambou, Global Health Department, Institut Pasteur, Paris, France

 

 

Résumé

Introduction: la cysticercose à T. solium est une parasitose zoonotique répandue chez les porcs et les humains dans les pays en développement. Cette maladie est la cause majeure de saisie de viande de porcs sur les marchés ce qui représente une perte importante pour les éleveurs. Cependant, ce fardeau est largement sous-estimé en raison de l´absence de contrôle officiel tout au long de la filière porcine dans ces pays. Ce manque de contrôle entrave les politiques d´éradication de cette zoonose. La mise en place de stratégies de dépistage utilisant des tests biologiques, en amont des abattoirs est urgente.

 

Méthodes: la méthode d´inspection traditionnelle de la cysticercose porcine a été étudiée en comparant l´inspection des carcasses de porcs abattus dans les trois principaux abattoirs de la ville d´Antananarivo, à analyse sérologique menées sur les sérums collectés chez ces mêmes animaux (Western Blot et l´Enzyme-Linked Immunosorbent Assay, ELISA). Le western blot a été considéré comme le gold standard.

 

Résultats: au total 194 porcs ont été analysés au cours de cette étude. La prévalence de l´infection était globalement de 52% (IC95% : 44,79 - 59,27) pour l´inspection des carcasses, 71,65% (IC95% : 64,75 - 77,87) pour la sérologie ELISA et 50,5% (IC95% : 43,26 - 57,75) pour la sérologie western blot (IC95% : 43,26 - 57,75). Les valeurs de kappa étaient de 0,45 et 0,54 entre les résultats de la technique d´inspection des carcasses et ceux des tests Western Blot et ELISA, respectivement.

 

Conclusion: cette étude révèle une fréquence élevée de contamination des cochons abattus et souligne la nécessité de mettre en place une méthode de diagnostic rapide utilisable à l´entrée des abattoirs pour limiter le taeniasis chez l´homme et secondairement la cysticercose.


Introduction: T. solium cysticercosis is a widespread parasitic zoonotic disease affecting pigs and humans in developing countries. This disease is the main cause of seizure of pork meat in the markets, resulting in huge loss to the farmers. However, this burden is largely underestimated due to the lack of official control throughout the pig supply chain in these countries. This lack of control hinders policies to eradicate this zoonosis. The implementation of screening strategies using biological tests, upstream of slaughterhouses, is urgent. Methods: traditional inspection for porcine cysticercosis was investigated by comparing the inspection of pig carcasses slaughtered in the three main slaughterhouses of the city of Antananarivo, with serological analysis carried out on sera collected from these same animals (Western Blot and Enzyme-Linked Immunosorbent Assay, ELISA). Western Blotting was considered the gold standard technique. Results: a total of 194 pork samples were analyzed in this study. The overall prevalence of infection was 52% (95% CI: 44.79 - 59.27) for carcass inspection, 71.65% (95% CI: 64,75 - 77,87) for serological ELISA test and 50,5% (95% CI: 43,26 - 57,75) for serological Western blot (95% CI: 43.26 and 57.75). Kappa values were 0.45 and 0.54 between carcass inspection and Western Blot and ELISA results, respectively. Conclusion: this study highlights a high frequency of contamination of slaughtered pigs and underlines the need for a rapid diagnostic method to be used at the entrance of slaughterhouses to limit T. solium in humans and secondarily cysticercosis.

Key words: Cysticercosis, Madagascar, pig, slaughterhouse, ELISA, western blotting

 

 

Introduction    Down

La cysticercose à Tænia solium est une parasitose cosmopolite qui affecte l´homme et le porc. Ces derniers contractent la cysticercose en ingérant les aliments et de l´eau contaminée par les œufs de T. solium rejetés dans l´environnement via les selles d´un homme porteur de vers adulte [1]. L´homme se contamine en ingérant la larve de T. solium contenu dans la viande de porc crue ou mal cuite [2] et développe un taeniasis [3,4]. L´homme développe une cysticercose par contamination interhumaine en remplaçant le porc dans le cycle épidémiologique du parasite (contamination directe par les mains sales, ou indirecte par les aliments contaminés par les œufs). La cysticercose est plus fréquente dans les pays en développement où le taeniasis est fréquent, lié lui-même à la pratique de l´élevage de porcs en divagation [3,5,6]. Chez l´homme, la larve de T. solium se localise, de préférence, au niveau du système nerveux central, l´œil, les muscles et le tissu cellulaire sous-cutané [7]. La neurocysticercose (localisation neurologique de la larve) est l´une des infections les plus fréquentes du système nerveux central [8,9] et la cause majeure de l´épilepsie en Afrique [10]. Cette parasitose occasionne de lourdes pertes économiques dans la filière porcine [11]. Hormis les régions où l´élevage et surtout la consommation du porc constituent un tabou, la cysticercose porcine affecte probablement tous les pays d´Afrique [5,12], et particulièrement Madagascar [11,13,14].

La cysticercose constitue un problème de santé grave mais sous-estimé [15]. Au vu de l´impact de la maladie sur la santé humaine et animale, et de son cycle épidémiologie l´Organisation Mondiale de la Santé (OMS) l´a inscrite récemment sur la liste des maladies négligées prioritaires potentiellement « éradicables ». Elle invite ainsi les chercheurs et les programmes nationaux à mettre en place des mécanismes de surveillance appropriés pour l´enregistrement des nouveaux cas de cysticercose afin d´identifier les zones à haut risque et y appliquer en priorité les mesures de prévention et de lutte. Cependant la consommation de viande de porc contaminée reste le vecteur principal de propagation de la maladie en dehors des zones d´élevage. Aucune zone ne peut être considérée comme épargnée, notamment les villes ou la promiscuité des habitats dans les quartiers défavorisés facilite la contamination interhumaine. Ainsi détecter les carcasses contaminées dans les abattoirs des grandes villes reste le moyen le plus efficace de protéger ces populations. L´inspection visuelle est la méthode habituelle pour cette détection, mais elle est soumise à l´insuffisance des ressources vétérinaires pour assurer cette détection, à la rusticité des méthodes d´inspection homologuées, et à la facilité de dissimulation de la part des éleveurs. Un contrôle « avant abattage » des animaux par des méthodes notamment sérologiques, pourrait être proposé comme alternative, si des tests rapides étaient disponibles.

L´objectif de cette étude était donc de comparer les resultats de l´inspection traditionnelle des carcasses avec la sérologie pour la cysticercose par Enzyme-Linked Immunosorbent Assay (ELISA) et le Western Blot (WB). Pour éviter toute confusion, le sang était prélevé lors de l´abattage des animaux et juste avant l´inspection de la carcasse. Trois abattoirs traitant des animaux d´origines géographiques différentes ont été investigués.

 

 

Méthodes Up    Down

Organisation de l´étude

Il s´agit d´une étude transversale menée dans trois abattoirs de la ville d´Antananarivo.

Site de collecte des échantillons

Les trois abattoirs se trouvent en périphérie de la ville d´Antananarivo, la capitale du pays. Le choix de ces trois tueries a été justifié par le nombre important de porcs abattus par jour et par la diversité de la provenance géographique de ces animaux. Anosizato se trouve dans la Commune Rurale Anosizato Andrefana, District d´Antananarivo Atsimondrano sur la RN1. Le complexe d´abattage d´Anosizato regroupe le plus grand nombre de tueries avec un total de 23 dont une pour les ovins et caprins, dix pour les bovins et douze pour les cochons. Pour des raisons logistiques lors de cette étude seules deux tueries de porc ont été investiguées. Elles ont eu leur agrément en 2017. Les porcs abattus dans ces deux tueries proviennent de tout le pays, et approvisionnent en viande tous les marchés des six communes urbaines d´Antananarivo. Anosipatrana se trouve dans le IVe arrondissement de la Commune d´Antananarivo. Les conditions d´hygiène et les matériels ne sont pas aux normes. Les animaux abattus dans cette tuerie proviennent également de tout le pays et les carcasses approvisionnent les marchés de la ville. Ampasika est localisé sur la route reliant la capitale à la ville Itaosy vers l´Ouest du pays. C´est un carrefour important entre la RN7, la RN4 et le centre-ville. Le complexe d´abattage d´Ampasika compte plusieurs tueries privées dont deux pratiquent à la fois l´abattage des porcs et celle des bovidés. Les compartiments propres et souillés sont bien différenciés à l´intérieur des tueries mais l´état des lieux n´est pas encore conforme aux normes [16]. La moitié des porcs abattus à Ampasika proviennent de la partie Moyen Ouest de l´île [16].

Animaux sélectionnés, données et traitement des échantillons

L´étude s´est déroulée du 18 janvier 2019 au 30 mars 2019 avec un échantillonnage d´une matinée par semaine pour chaque site. Avant l´abattage, les animaux ont été sélectionnés par alternance (un sur deux) et des numéros identifiants leurs ont été attribués. Les prélèvements ont été effectués vers 2 heures du matin, dans les trois abattoirs. Au moment de l´égorgement, le sang des animaux sélectionnés a été collecté directement dans les tubes sans anticoagulants. Les tubes ont été conservés immédiatement à 4°C jusqu´à centrifugation au laboratoire. Les sérums obtenus ont été par la suite conservés à -80°C jusqu´à leur utilisation.

Variables enregistrées et analyses réalisées

Inspection des carcasses

L´inspection des carcasses a été effectuée par les personnels des tueries habituellement en charge de cette activité, selon la méthode de Goussanou et al. 2013. Cette méthode est la procédure officielle retenue à Madagascar. L´inspection réalisée par incision concerne uniquement le cœur, les muscles du cou, la tête, la langue et les muscles psoas [17]. Selon cette méthode, la découverte de kystes épars ne permet pas la déclaration de contamination de la viande, entrainant une sous-déclaration.

Analyse sérologique des sérums

L´ELISA et le Western blot ont été systématiquement utilisés pour l´analyse des sérums. Les anticorps dirigés contre de la fraction glycosylée du kyste ont été détectés selon Tsang et al., 1989 [18]. Le western blot a été considéré comme le test de référence de par sa plus grande spécificité [18,19]. Le sérum était déclaré positif en WB si deux bandes au moins étaient détectées, à l´exclusion de la bande à 50 kDa considérée comme non spécifique et de celles de haut poids moléculaire. Les protocoles de la sérologie ELISA et Western Blot sont décrit en détail sur dx.doi.org/10.17504/protocols.io.t4kequw.

Biais de l´étude

Le biais principal de cette étude est lié à l´accord préalable des éleveurs qui devait être obtenu avant examen des carcasses et collecte de sang. La réticence des éleveurs était liée à la possible destruction des carcasses en cas de positivité. Pour éviter cela l´examen a été réalisé par le personnel de l´abattoir sans interférence avec la procédure officielle. Le résultat sérologique était obtenu ultérieurement et n´avait pas d´incidence pour l´éleveur. Cette implication des équipes des abattoirs a sans doute induit une variabilité entre abattoir.

Taille de l´échantillonnage

La taille de l´échantillonnage a été calculée pour une étude en population à trois strates avec un taux d´infection d´au moins 20% des animaux estimé selon les études précédentes, et pour une précision de 5% avec une puissance de 95%. Deux cent quarente six (246) animaux étaient nécessaires au total.

Analyse statistique

L´ensemble des données a été saisi sur Excel, puis analysé avec le logiciel Epi-Info 7. Les données obtenues étaient qualitatives que ce soit pour l´examen des carcasses ou les résultats de sérologie considérés en positif/négatif seulement. Une analyse statistique descriptive a été réalisée et la prévalence a été évaluée avec un intervalle de confiance à 95%. Le logiciel XLSTAT 2014 a été utilisé pour calculer le coefficient de kappa de Cohen. Le test de kappa de Cohen a permis de mesurer l´accord entre les résultats obtenus avec la technique de l´inspection des carcasses et ceux des tests sérologiques, avec un intervalle de confiance à 95%, également. Cet accord a été noté, passable, modéré, bon et excellent lorsque les valeurs de kappa étaient comprises entre (0,21 et 0,40), (0,41 et 0,60), (0,61 et 0,80) et (0,81 et 1), respectivement [20]. Le test de chi2 avec un degré de significativité à 5% a été utilisé pour rechercher la concordance entre la technique d´inspection des carcasses et les techniques sérologiques de WB et d´ELISA.

 

 

Résultats Up    Down

Animaux examinés

Sur la période d´étude qui s´est déroulée du 18 janvier 2019 au 30 mars 2019 un total de 21 matinée de collecte a pu être réalisé pour les trois sites. Cent quatre voingt quatorze (194) porcs ont été recrutés et testés par deux méthodes (inspection et sérologie). La répartition des porcs recrutés par abattoir était de 61 à Ampasika, 85 à Anosipatrana et 48 à Anosizato (Tableau 1). Très peu d´informations étaient disponibles sur les cochons abattus, par réticence des vendeurs eux-mêmes, craignant des inspections. Il n´y a pas en effet de véritable traçabilité administrative des animaux dans ces tueries traditionnelles, les acheteurs finaux se fournissant directement auprès d´éleveurs connus et hésitant à révéler leur source.

Données obtenues

Sur les 194 carcasses de porcs inspectées. L´étude a été effectuée sur des porcs de races locales et métisses provenant de toute l´île. A l´inspection, 101 présentaient des cysticerques, soit une prévalence globale de 52%. Cependant la contamination était très différente entre abattoirs allant de 29 à 70%. L´abattoir « hors normes » d´Anosipatrana abattant le plus de cochons contaminés, peut être par absence connue de contrôle vétérinaire. La sérologie ELISA a permis de détecter la présence d´anticorps anti-cysticerque dans les sérums de 139 porcs, soit une séroprévalence globale apparente de 71,65% (IC95% : 64,75 - 77,87) avec un maximum à 80% et un minimum à 55% (Tableau 1). Cependant le ratio de détection ELISA/inspection variait également avec l´abattoir allant de 1.8 et 1.6 à 1.13 pour Anosipatrana. Le pourcentage élevé de cochons contaminés détectés à l´inspection dans ce dernier abattoir pourrait donc traduire plutôt un meilleur score des inspecteurs. La confirmation par technique western blot révélait la présence d´anticorps dirigés contre les cysticerques chez 98 porcs, soit une séroprévalence globale de 50,5% allant de 42% à 57% selon l´abattoir (IC95% : 43,26 - 57,75). Les résultats en WB et ELISA est plus faible pour Anosizato. Là encore une disparité entre sérologie et inspection était observée avec un ratio sérologie/inspection de 1,4 pour Ampasika déclarant officiellement le moins de contamination à l´inspection (ce qui traduit une sous-estimation), à 1 pour Anosizato, mais à 0.8 pour Anosipatra. Dans ce dernier abattoir, l´inspection semble donc surestimer la contamination.

Résultats principaux

Si le western blot semble donner des résultats grossièrement en adéquation avec l´inspection, la concordance pour un cochon donné, entre les deux approches n´est pas aussi assurée. Ces discordances varient également selon l´abattoir. Le test de kappa de Cohen a été utilisé pour évaluer l´accord entre les résultats. Les valeurs de kappa étaient de 0,45 et 0,54 entre les résultats de l´inspection des carcasses et ceux des tests Western Blot et Elisa, respectivement (Tableau 2). Ces valeurs ont montré qu´un accord modéré existait entre les resultats des tests sérologiques et ceux de la technique d´inspection des carcasses. L´ELISA permet un meilleur screening des porcs avant abattage puisque seulement trois carcasses sur 194 présentaient des cysticerques à l´inspection mais pas d´anticorps, avec cependant une spécificité plus faible. La spécificité du WB reste bien sur supérieure à celle de l´ELISA (Tableau 2). Cette spécificité de l´inspection semble bonne (94,5%) par rapport à l´ELISA, mais variable par rapport au WB (seulement 44,4% à Anosipatrana). Au total, la prévalence de la cysticercose porcine était cependant supérieure à 50%, quel que soit la technique utilisée. Dans ce contexte les spécificités sont difficiles à évaluer car le statut négatif des carcasses n´est pas sûr en l´absence de dissection complète. Cependant la performance de l´inspection telle que menée dans les abattoirs peuvent être définis par rapport à la sérologie (Tableau 2), traduisant sans doute une formation insuffisante des inspecteurs.

 

 

Discussion Up    Down

Résultats principaux

La détection des animaux contaminés par la cysticercose pour leur éviction de la chaine de consommation est un maillon fondamental de la lutte contre le taeniasis et la cysticercose notamment en zone urbaine. Cette étude a permis d´évaluer la concordance entre la méthode traditionnelle d´inspection des carcasses et la sérologie des animaux contre cette maladie. Parallèlement les résultats de séroprévalence ont permis une mise à jour des données du ministère, par rapport aux études précédemment menées dans ces tueries [11]. La prévalence retrouvée à l´inspection était de 52% contre seulement 4,6% rapportés par Porphyre et al. en 2015 par méthode post-mortem. Ce pourcentage très élevé est également supérieur aux prévalences rapportées dans les autres pays comme par Mopoundza et al. en 2019 dans l´aire d´abattage de Kinsoundi à Brazzaville (1,69%) [12], par Assana et al. en 2001 au Nord du Cameroun et au Sud-ouest du Tchad (15,7%) [5] ou celui obtenu par Sithole et al. en 2019 dans deux abattoirs de la province du Cap-Oriental en Afrique du Sud [21]. Cette prévalence se rapproche par contre de celle obtenue par l´inspection des carcasses en Zambie (47,7%) [22], rappelant que Madagascar et la Zambie restent les deux foyers majeur de cysticercose porcine en Afrique.

La séroprévalence apparente obtenue par l´Elisa au cours de cette étude était encore plus élevée avec 71,65%. Cette séroprévalence était largement supérieure aux estimations de séroprévalences obtenues par détection d´antigène dans d´autres pays d´Afrique comme la Tanzanie [23], le Mozambique [24], le Kenya [25], l´Afrique du Sud [26] ou en Amérique Latine [27]. Ce qui peut s´expliquer par une durée plus longue de persistance des anticorps par rapport à la circulation des antigènes parasitaires, mais aussi par une surestimation possible par réactions croisées avec d´autres helminthes comme T. hydatigena. La prévalence réelle globale dans la présente étude doit être considérée comme celle obtenue par Western blot. Cette prévalence était ainsi de 50,5%, ce qui reste supérieur aux résultats publiés par d´autres auteurs avec la même méthode comme au Pérou (45,19%) [28] ou dans d´autres pays [29-32]. Cette forte séroprévalence à Madagascar pourrait s´expliquer par le fait que la majorité des porcs abattus dans ces abattoirs sont élevés en divagation comme en Zambie [33,34].

Limitations

Les limitations principales de l´étude concernaient le biais d´échantillonage dû à l´acceptattion des éléveurs. Cette limitation ne peut que sous-estimer la prévalence observée.

Interprétation

Selon ces trois méthodes, les performances des abattoirs ne sont pas identiques, avec une contamination très nettement supérieure pour l´abattoir le moins bien contrôlé sur le plan vétérinaire. Si les pourcentages de contamination sont assez équivalents pour l´inspection des carcasses et le western blot, l´ELISA surestime largement cette prévalence. Les différences observées entre résultats de sérologie et d´inspection peuvent s´expliquer d´abord par la méthode standardisée mais sommaire d´inspection utilisée à Madagascar qui ne comporte pas de dissection exhaustive. De plus cette méthode considère comme contaminées les carcasses ayant plus d´un parasite sur une surface d´équivalente à une main. La concordance entre les différentes méthodes est donc bonne mais très imparfaite et varie d´un abattoir à l´autre sans doute selon les performances de l´examinateur. Les résultats moins bons du western blot dans un des abattoirs pourrait être du ainsi à l´inverse à un effet de zèle de d´un examinateur se sachant observé.

Selon ces trois méthodes, les performances des abattoirs ne sont pas identiques, avec une contamination très nettement supérieure pour l´abattoir le moins bien contrôlé sur le plan vétérinaire. Si les pourcentages de contamination sont assez équivalents pour l´inspection des carcasses et le western blot, l´ELISA surestime largement cette prévalence. Les différences observées entre résultats de sérologie et d´inspection peuvent s´expliquer d´abord par la méthode standardisée mais sommaire d´inspection utilisée à Madagascar qui ne comporte pas de dissection exhaustive. De plus cette méthode considère comme contaminées les carcasses ayant plus d´un parasite sur une surface d´équivalente à une main. La concordance entre les différentes méthodes est donc bonne mais très imparfaite et varie d´un abattoir à l´autre sans doute selon les performances de l´examinateur. Les résultats moins bons du western blot dans un des abattoirs pourrait être du ainsi à l´inverse à un effet de zèle de d´un examinateur se sachant observé.

Généralisation

Cette étude montre que pour le développement d´un test rapide, il faudrait plutôt se référer à une spécificité élevée comme celle du WB et non une sensibilité haute comme l´ELISA au risque d´éliminer dans les tueries officielles, la majorité des animaux avant abattage, et de créer de facto des circuits parallèles d´abattage.

 

 

Conclusion Up    Down

Les résultats obtenus dans cette étude ont montré que la cysticercose porcine était toujours un problème de santé publique à Madagascar. Cependant, notre étude présente des limites comme l´absence d´information sur les animaux (type d´élevage, âge, origine exacte, etc). Il est donc nécessaire que les autorités sanitaires mettent en place un système de surveillance plus strict de la viande de porc vendue sur les marchés afin de garantir la santé des consommateurs. La concordance obtenue entre la technique d´inspection des carcasses et les tests sérologiques a montré que ces tests pouvaient remplacer la technique d´inspection des carcasses dans le cadre de la surveillance de la viande de porc. Ces techniques ante mortem permettront d´ailleurs de minimiser les pertes économiques dues à la cysticercose positive découverte après l´abattage de l´animal, un traitement efficace et peu onéreux étant à la disposition des éleveurs.

Etat des connaissances sur le sujet

  • La cysticercose constitue un problème de santé grave mais sous-estimé avec plus de la moitié des carcasses destinées au marché urbain contaminée;
  • Le dépistage chez les porcs contribue à la lutte contre de cette parasitose, car la rupture du cycle de développement de T. solium passe par la limitation du taeniasis chez l´homme.

Contribution de notre étude à la connaissance

  • Mettre à jour les données épidémiologiques de la cysticercose porcine à Antananarivo, Madagascar;
  • L´utilité des tests sérologiques (ELISA et Western) dans le programme de la surveillance de la viande de porc vendue sur les marchés.

 

 

Conflits d'intérêts Up    Down

Les auteurs ne déclarent aucun conflit d´intérêt.

 

 

Contributions des auteurs Up    Down

Kouadio Thierry-Borel N´dri a réalisé les analyses sérologiques, l´analyse les données, produit le draft de l´article. Zara Nomentsoa Razafiarimanga, Tantely Randriamparany ont réalisé les collectes de données et relu l´article. Mireille Nowakowsky ont produit les réactifs purifiés. Joseph Allico Djaman a supervisé les analyses et relu l´article. Ronan Jambou a obtenu les crédits, organisé le protocole, supervisé l´étude et les analyses et finalisé le texte. Tous les auteurs ont lu et approuvé la version finale du manuscript.

 

 

Remerciements Up    Down

Nous remercions particulièrement les éleveurs de leur patience lors de l´étude. Ce projet a été soutenu par un credit Pasteur Innov de l´Institut Pasteur à Paris.

 

 

Tableaux Up    Down

Tableau 1: prévalence de la cysticercose porcine par abattoirs et par techniques

Tableau 2: résultats croisés entre l´inspection des carcasses et les tests sérologiques (WESTERN BLOT-CS50 et ELISA-CS50)

 

 

Références Up    Down

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